Ricardo ETXEPARE et Myriam URIBE-ETXEBARRIA : « In-situ wh-phrases in Spanish : locality and quantification »
Cet article analyse les questions à syntagme-wh (qu-) in-situ en espagnol. Il montre que la position de surface de ces syntagmes est le résultat d’un mouvement visible vers une position focale dans la péripherie gauche. La position post-verbale dans laquelle les syntagmes-wh apparaissent résulte d’un mouvement postérieur par-dessus la position focale, dans l’esprit des propositions récentes de Kayne (1998, 2000). L’analyse défendue ici conduit à distinguer le phénomène in-situ en espagnol des phénomènes correspondants rencontrés dans les autres langues romanes, dont le français (Chang, 1997; Cheng et Rooryck, 2000; Boýkoviç, 2000). Il est ainsi démontré que les mécanismes syntaxiques supposés déterminer la distribution des syntagmes-wh-in-situ dans ces langues doivent être modifiés dans le cas de l’espagnol. Dans une perspective comparative, les données de l’espagnol étayent une approche ‘pluraliste’ des stratégies in-situ (Cheng et Rooryck, 2003), selon laquelle la notion descriptive de syntagme in-situ recouvre un domaine grammatical non homogène. D’un point de vue théorique, notre analyse appuie l’idée que beaucoup de phénomènes analysés comme mouvement abstrait (en Forme Logique) dans la tradition du Gouvernement-Liage doivent être réanalysés comme cas de mouvement visible (masqué).
MOTS-CLÉS : Focus contrastif, mouvement abstrait, mouvement résiduel, dislocation à droite, espagnol, wh-in-situ.
Günther GREWENDORF : « The asymmetry of short and long wh-extraction in German »
En cas d’extraction à courte distance, le mouvement-wh ne déclenche, en allemand, ni effet de croisement faible ni effet de supériorité. Cette situation change lorsque le mouvement-wh se fait à longue distance: des effets de croisement aussi bien que de supériorité sont alors observés. Cet article propose une analyse minimaliste des constructions-wh en allemand qui a pour but d’expliquer ces propriétés. En examinant différentes constructions qui mettent en jeu la périphérie gauche, et en utilisant des traits multiples associés aux éléments-wh, nous montrons que le mouvement court et le mouvement long visent des positions différentes dans la périphérie gauche.
MOTS-CLÉS : Allemand, mouvement-wh long, mouvement-wh court, topicalisation, positions d’opérateur, supériorité, croisement faible.
Hans-Georg OBENAUER : « La syntaxe des questions non standard : Les questions de surprise-désapprobation en bellunese »
Les interrogatives-wh, on le sait bien, peuvent avoir d’autres interprétations que celle de “demande d’information”, c’est-à-dire de demande de spécifier la (ou les) valeur(s) de la variable liée par le quantifieur-wh. De telles interprétations correspondent-elles simplement à des “utilisations non canoniques” d’interrogatives “normales”, dans des contextes linguistiques et/ou situations extralinguistiques particuliers, ou sont-elles associées à des structures distinctes et, par conséquent, basées sur la syntaxe ?
Une réponse est fournie par le bellunese, dialecte de l’Italie du Nord-Est, qui distingue de façon visible les questions standard (où les wh nus occupent une position interne) et les questions non standard (où les wh nus apparaissent en position initiale). L’article montre qu’il existe (au moins) trois types de questions non standard et examine de façon détaillée la syntaxe d’un d’entre eux, les “questions de surprise-désapprobation” (QSD), pris comme cas exemplaire. L’étude de quatre propriétés distinctives &endash; la position initiale des wh nus, l’interdiction de che ‘que/quoi’ en position initiale, son “remplacement” par un autre élément, cossa, et le “redoublement” apparemment optionnel de cossa par che, un fait unique dans la syntaxe du bellunese &endash; conduisent aux résultats suivants.
Les QSD ajoutent une couche fonctionnelle au-dessus de la structure dérivée dans les questions standard. Les quatre propriétés particulières des QSD peuvent toutes être reliées à l’exigence d’activer cette couche. Le che “optionnel” n’est pas optionnel, mais présent dans la structure même lorsqu’il n’est pas réalisé phonétiquement. La conclusion générale est que la Grammaire Universelle prévoit des moyens structuraux pour le codage syntaxique du sens des questions non standard, dans le cas présent, dans la périphérie gauche.
MOTS-CLÉS : Bellunese (dialecte de l’Italie du Nord-Est), questions-wh, questions non standard, questions de surprise-désapprobation, CP éclaté, éléments “optionnels”, redoublement-wh, codage structural de l’interprétation de question non standard.
Javier ORMAZABAL : « The Syntactic Distribution of Factive Complements »
Cet article analyse l’observation de Kiparsky et Kiparsky (1970), selon laquelle il existe une corrélation profonde entre la syntaxe et la sémantique des compléments factifs à la lumière d’un large ensemble de phénomènes déjà connus et nouveaux: l’incompatibilité des compléments à marquage de cas exceptionnel et sans complémenteur that avec les prédicats factifs, les effets d’îlots faibles, l’incompatibilité des compléments purement propositionnels avec les verbes contenant des préfixes aspectuels (RE-, DIS-), les restrictions sur la concordance des temps dans les contextes propositionnels. Je propose qu’il existe une différence structurale entre compléments propositionnels et factifs relative à la position syntaxique qu’ils occupent, différence qui rend compte des phénomènes syntaxiques discutés ici, et qui fournit en même temps une base solide pour l’expression de la différence sémantique &endash; présence vs absence d’une présupposition &endash; entre les types de compléments: les compléments factifs apparaissent, en FL, à l’extérieur de VP, tandis que les compléments propositionnels doivent occuper leur position “de base” à l’intérieur de VP.
MOTS-CLÉS : Factive, précupposition, proposition, sélection du complémenteur, complémenteur zéro, affixation d’éléments zéro, interface syntaxe-sémantique, interactions entre temps et prédicats, concordance des temps.
Waltraud PAUL : « Low IP area and left periphery in Mandarin Chinese »
L’hypothèse de Belletti (2003), selon laquelle l’architecture fonctionnelle à l’intérieur d’IP reflète celle au-dessus d’IP, est examinée pour le mandarin. Tandis que le parallélisme entre CP et la partie basse d’IP se trouve confirmé, la hiérarchie obtenue pour le mandarin, ‘CP (force) > TopP > FocusP ‘même’ > IP > TopP interne > FocusP ‘même’ > vP’, ne correspond que partiellement à celle proposée par Rizzi (1997, 2002) et Belletti (2003), surtout en ce qui concerne l’ordre relatif entre topique et focus. En effet, en mandarin un TopP au-dessous de FocusP est exclu aussi bien dans CP que dans IP et il n’y a pas non plus de ModP dans la périphérie gauche, projection introduite par Rizzi (2002) pour abriter des adverbes déplacés. Ces différences s’expliquent partiellement par l’idée reçue que le topique véhicule toujours de l’ancienne information, idée clairement infirmée par le mandarin.
MOTS-CLÉS : Mandarin, périphérie gauche, périphérie d’IP, topique, focus, antéposition d’objet.
Cecilia POLETTO, Jean-Yves POLLOCK : « On Wh-clitics, Wh-doubling and Apparent Wh-in-situ in French and some North Eastern Italian Dialects »
L’objectif principal de cet article est de contribuer à la compréhension des questions à redoublement des mots-wh communes dans de nombreux dialectes de l’Italie du Nord, d’une part, et, d’autre part, de la syntaxe des questions en que du français que nous analysons comme un cas de redoublement caché. Notre thèse est que les deux types de construction mettent en jeu dans le domaine des déplacements A-barre la contrepartie du redoublement des clitiques pronominaux. La mise en oeuvre de ces idées repose sur une périphérie gauche hautement ‘éclatée’ et sur le déplacement résiduel de IP dans les différentes projections du domaine CP.
MOTS-CLÉS : Clitiques, redoublement, mouvement-wh, CP éclaté, déplacement résiduel, dialectes de l’Italie du Nord, français.
Sylvie FERRANDO : « ‘Comparé à’, ‘par rapport à’ : limites et excès de l’antonymie différentielle »
Dans le cadre de la sémantique de la comparaison et de la polarité, et à partir de l’antonymie différentielle (Kennedy, 2001), nous nous interrogerons sur les structures comparatives générant la polarité croisée pour proposer deux types de comparaison de déviation: l’un à valeur de référence unique, l’autre à double valeur de référence. Puis nous montrerons que certaines structures de la comparaison explicitée en ‘comparé à’, ‘par rapport à’, qui génèrent la polarité croisée, présentent une autre interprétation, la comparaison relative ordonnée converse, compatible ou non avec la comparaison de déviation, et nous contrasterons ces deux structures sur les plans sémantique et syntaxique pour montrer leur non-équivalence, et le statut intermédiaire de l’anglais ‘compared to’.
MOTS-CLÉS : Comparaison, polarité croisée, antonymie différentielle, relation converse.