
Abonnement revue Médiévales
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Médiévales paraît deux fois par an.
Langue de rédaction des articles : français
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L’objectif du numéro est de préciser ce que représente le couple au haut Moyen Âge (VIe-XIIe siècle).
Que représente le couple dans la réalité quotidienne et dans la perception que l’on en avait, ainsi que les évolutions qui affectent l’une et l’autre, à une époque marquée par le rôle déterminant des groupements de parenté larges ?
Comment un homme et une femme, mariés légitimement sans s’être choisis, vivent-ils et agissent ensemble, ce qui ne signifie pas forcément de la même manière ? Sont-ils envisagés en tant que communauté solidaire, ce qui ne signifie pas égalitaire ? Comment le couple s’inscrit-il dans les groupements de parenté larges et quelles sont les conséquences sur ce plan de la transformation progressive, aux Xe-XIe siècles, des Sippen (alliances en dehors des liens du sang) en lignages ? Le couple correspond-il à la même réalité et est-il perçu de manière identique à tous les échelons de la société et dans tous les espaces ?
Du couple et des couples à l’époque carolingienne Janet NELSON
Le couple aristocratique au haut Moyen Âge Régine LE JAN
Les couples chastes à la fin de l’Antiquité et au haut Moyen Âge Sylvie JOYE
Un homme, une femme et des enfants : autour du couple dans quelques images du haut Moyen Âge Dominique ALIBERT
Le couple dans les stratégies compétitives de la Francie occidentale du XIe siècle Emmanuelle SANTINELLI-FOLTZ
Le couple en droit : autour de l’affectio maritalis et des échanges patrimoniaux Agathe BAROIN
Le couple, stratégie d’identité et de perpétuation des lignages (Provence, XeXIIe siècles). Réflexions à partir de l’exemple des Agoult Laure VERDON
ESSAIS ET RECHERCHES
Éclipse ou Apocalypse, remarques autour du nœud du dragon, dans les miniatures des Commentaires de l’Apocalypse de Beatus de Liebana Anna CAIOZZO Causa unionis, fidei, reformationis : les pratiques judiciaires et la définition de l’autorité du Concile de Constance (1414-1418) Sebastián PROVVIDENTEPOINT DE VUE
Innocent III. Un pape de papier Arnaud FOSSIER – Notes de lecture – Livres reçusJanet Nelson Du couple et des couples à l’époque carolingienne
Le couple a souvent été considéré par les médiévistes occidentaux à la fois comme une donnée de l’organisation d’une société civilisée et comme une invention de la période carolingienne. Eileen Power, une sociologue intéressée par le Moyen Âge, a proposé une vision bucolique du couple tel qu’il apparaît dans les polyptyques. Le présent article propose de nuancer ce tableau. Il réexamine la typologie des groupes familiaux, les unions hyper- et hypogamiques, et la pertinence de la notion de « compagnonnage du mariage ». Les sources légales éclairent la collaboratio au sein des couples. Le couple ne vient qu’en second, après la mariée, dans les plus anciens textes liturgiques occidentaux. Il démontre que trois exemples de couples bien connus, souvent vus comme représentatifs, peuvent en réalité être considérés comme curieux à divers égards. Enfin, c’est de la cour de Charlemagne que nous vient un aperçu d’une discussion étonnamment empathique au sujet des relations homme-femme.
Régine Le Jan Le couple aristocratique au haut Moyen Âge
Le couple conjugal n’est pas une donnée sociale invariable et intangible, mais une construction soumise au changement. Au haut Moyen Âge, le système de parenté cognatique et la faiblesse des structures étatiques placent le mariage au centre des échanges qui assurent l’équilibre social et qui régulent la compétition entre les groupes aristocratiques, mais il faut distinguer mariage et couple. Au début de la période, les tendances polygyniques affaiblissent la visibilité du couple, si le rapport de forces ne permet pas à une épouse de s’imposer. À terme cependant, la sédentarisation et la christianisation ont joué en faveur du mariage légal en promouvant la conjugalité et la monogamie. Dès le viie siècle, des couples développent ensemble des stratégies patrimoniales et politiques, ce qui permet aux évêques de promouvoir, au ixe siècle, une idéologie sociale fondée sur le modèle conjugal. Cependant, c’est seulement à la fin du IXe siècle qu’interviennent des changements profonds qui conduisent à associer directement l’épouse aristocratique à la gestion du pouvoir et à mettre en scène le couple en tant qu’acteur social et politique.
Sylvie Joye Couples chastes à la fin de l’Antiquité et au haut Moyen Âge
L’article évoque pour commencer la figure du couple resté vierge après le mariage dans l’hagiographie du très haut Moyen Âge. Il rappelle les paradoxes de la valorisation simultanée de l’ascétisme et de l’amour conjugal à la fin de l’Antiquité. L’article analyse ensuite plus précisément la mise en scène de ces couples vierges, en particulier dans la Vie d’Amâtre et dans les œuvres de Grégoire de Tours. Le récit du déroulement de la nuit des noces, des preuves de la virginité des époux, de la mise au tombeau permettent d’entrevoir à la fois l’idéal du mariage et celui de l’ascétisme, qui deviennent de plus en plus inconciliables. À partir de l’époque carolingienne et même dès le viie siècle, ce modèle disparaît quasiment, ou ne subsiste que sous une forme bien aseptisée, qui gomme toute l’intimité de la cohabitation.
Dominique Alibert Un homme, une femme et des enfants : autour du couple dans quelques images du Haut Moyen Âge
À partir d’un corpus iconographique relativement réduit présentant des couples extraordinaires, David et Bethsabée, Charles le Chauve et Richilde, mais aussi des époux ordinaires, l’étude s’attache à définir la place que l’iconographie carolingienne entend attribuer au couple. Si la fonction parentale et la condamnation de l’adultère sont mis en avant, ce n’est pas exclusivement pour des questions morales mais aussi parce que la dynastie carolingienne a la mission de conduire le peuple franc, nouveau peuple élu, vers ses destinées finales.
Emmanuelle Santinelli-Foltz Le couple dans les stratégies compétitives de la Francie occidentale du xie siècle
Comment le couple intervient-il dans les stratégies compétitives ou du moins quel témoignage en donnent les sources ? Si les époux forment une nouvelle unité de de vie, marquée au xie siècle par l’association plus étroite de l’épouse, ils continuent néanmoins à appartenir à leur famille respective. Il s’agit donc d’analyser les relations non seulement au sein du couple mais aussi entre celui-ci et les groupes familiaux dans lesquels il s’insère. Pour cela, trois cas de figure seront successivement envisagés : d’abord celui où le couple apparait solidaire ; ensuite, celui où les conjoints, tout en étant liés, se trouvent investis différemment dans la compétition ; enfin, celui où ils sont en compétition l’un contre l’autre.
Agathe Baroin Le couple en droit au haut Moyen Âge : autour de l’affectio maritalis et des relations patrimoniales
Héritière de traditions juridiques romaines et chrétiennes, mais fortement influencée par des coutumes encore très vivaces dans le domaine du droit privé, la société franque constitue un excellent laboratoire pour l’étude du couple. La comparaison des sources normatives et narratives avec la norme religieuse énoncée dans les canons des conciles va permettre d’expliquer comment l’Église a progressivement investi le champ matrimonial laissé vacant par le pouvoir royal, jusqu’à encadrer entièrement les relations de couple à partir de l’époque carolingienne. Sur une période allant de la fin du ve siècle jusqu’au xe siècle, l’article explore deux thèmes qui permettent de montrer les spécificités du couple alti-médiéval du point de vue du droit : les relations personnelles et les rapports patrimoniaux du couple.
Laure Verdon Le couple, stratégie d’identité et de perpétuation des lignages (Provence, xe-xiie siècle). Réflexions à partir de l’exemple des Agoult
La mise en place des structures lignagères s’opère, en Provence, entre la fin du xe siècle et la première moitié du xiie siècle. Dans ce processus, qui par certains aspects peut apparaître comme incomplet, en particulier parce que les règles de transmission du patrimoine demeurent égalitaires, la part prise par le couple et les stratégies qu’il déploie dans la gestion du patrimoine familial apparaissent prégnantes. La femme, en sa qualité d’épouse et de mère, se place au cœur des relations privilégiées que le lignage entretient avec certains établissements ecclésiastiques, tout comme sa dot sert le jeu des alliances féodales.
Anna Caiozzo Éclipse ou Apocalypse, remarques autour du nœud du dragon, dans les miniatures des Commentaires de l’Apocalypse de Beatus de Liebana
Les dragons des plus anciennes miniatures mozarabes des Commentaires de l’Apocalypse du moine Beatus de Liebana s’ornent d’un étrange dragon au nœud en forme de cœur, une forme que l’on retrouve déjà dans les sceaux-cylindres du Proche-Orient archaïque. Ce nœud est devenu le symbole des éclipses en astrologie, et plus généralement celui de la huitième planète, dite le Dragon (al-Jawzahar), à l’époque islamique, un héritage indien et iranien que les miniaturistes chrétiens ont utilisé, peut-être fortuitement, pour leurs dragons apocalyptiques.
Janet Nelson Couple and couples from the Carolingian times
The couple has often been taken by western medievalists as a given of civilized social arrangements and an invention of the Carolingian period. Eileen Power, a social scientist with medieval interests, took a rosy view of the couple in the polyptychs. This paper proposes some qualifications. Varieties of family group, hypergamous and hypogamous unions, and the relevance of ‘companionate’ marriage, are re-examined. Legal sources throw light on couples’ collaboratio. The couple takes second place to the bride in early western liturgical texts. Three well-known couples sometimes considered representative are shown to be, variously, odd. Finally, from Charlemagne’s court comes a glimpse of an unexpectedly sympathetic discussion of man-woman relationships.
Régine Le Jan The Aristocratic Couple in the Early Middle Age
Conjugal couple is no invariable and inviolable social fact, but a changeable construction. In the Early Middle Age, the cognatic Kinship system and the weakening of the State have placed the marriage in the middle of the social exchange system which assured the balance within the society and which regulated the competition between aristocratic groups. But we have to make the difference between marriage and couple. At the beginning of the period, polygenic trends weakened the conjugal visibility, if the balance of power didn’t allow one of the spouses to get the upper hand upon the other. Nevertheless, afterward, people’s settlement and Christianization have worked in favor of legal marriage, by promoting conjugality and monogamy. From the 7th century, couples have developed together patrimonial and political strategies, and in the 9th Century, Carolingian bishops could promote a social ideology based on the conjugal model. Nevertheless, it’s only at the end of the 9th century that deep change led to associate the aristocratic legal spouse directly to power management and to present the couple as a social and political actor.
Sylvie Joye Chaste couples at the end of Antiquity and in the High Middle Ages
This paper first evokes the married couples which are reputed to live a virginal union in the hagiography of Earlier Middle Ages. It stresses anew the paradoxes of the simultaneous valuation of asceticism and conjugal love during Late Antiquity. This paper analyzes then more acutely the depiction of these virgin couples, in particular in Amator’s first Life and in the writings o Grégoire of Tours. The narrative of the chaste wedding night, the proofs of the spouses’ virginity or the shared tomb reveal simultaneously the ideals of marriage and asceticism, which become more and more irreconcilable. From Carolingian time and even from the seventh century onward, these virgin couples almost disappear in the Saints’ Lifes, which put aside all the intimacy of a cohabitation.
Dominique Alibert Man, woman and children: the couple in a few images of the Early Middle Ages
From a relatively reduced iconographic corpus presenting extraordinary couples, David and Bethsabee, Charles the Bald and Richilde, but also ordinary spouses, this study attempts to define the place which the Carolingian iconography intends to attribute to the couple. If the parental function and the condemnation of the adultery are put forwards, it’s not exclusively for moral questions, but also because the Carolingian dynasty has the mission to lead the Franks, new elected people, towards its final destiny.
Emmanuelle Santinelli-Foltz Couple and competitive strategies in West Francia during the xith century
How does the couple intervene in competitive strategies or, at least, what testimony give the sources/documentation about it? If the spouses form a new unit of life, marked in the eleventh century by the more narrow association of the wife, they continue nevertheless to belong to their respective family. We have to analyze therefore the relations not only within the couple, but also between the couple and the family groups he’s part of. For this purpose, three cases will successively be considered: first, when the couple seems to be strongly united; second, when the spouses, even bounded, are invested differently in the competition; finally, when they are in competition the one against the other.
Agathe Baroin The couple in front of the law in the High Middle Ages : affectio maritalis and patrimonial relationships
The Frankish society, which is heiress of both Roman and Christian legal traditions, but strongly influenced by very strong customs in the field of private law, constitutes an excellent laboratory to study the couple. The comparison between the normative, narrative sources and the councils explains how the Church gradually got to gain control over the marriage. From the end of the fifth century to the tenth century, this article investigates two themes which show the specificities of the early medieval couple from a legal point of view: the personal and the patrimonial relationships between husband and wife.
Laure Verdon The couple, a strategy for the lineage’s identification and perpetuation (Provence, Xth-XIIth Century). Reflections based on the example of the Agoult.
Between the tenth and the twelfth century, in Provence, the structures of aristocratic “lineage” settle down, although this process can appear as incomplete due to the rules of patrimonial devolution which do not distinguish the eldest. Both members of the couple are active actors of the patrimony’s administration; the woman, as a mother and a spouse, is the key of the specific relations with monasteries and her dowry can be used in order to establish feudal alliances.
Anna Caiozzo Eclipse or Apocalypse. On the Dragon knot in the miniatures of the Beatus of Liebana’s Commentaries of the Apocalypse.
The dragons of the oldest Mozarabic miniatures of the Commentaries of the Apocalypse by the monk Beatus of Liebana are decorated with a strange dragon knot shaped as a heart, a form that already exists in cylinder seals from the archaic Middle East. This knot has become the symbol of eclipses in astrology and more generally that of the eighth planet, known in the Islamic era as the Dragon (al-Jawzahar), an Indian and Iranian legacy that Christian miniaturists have used – perhaps fortuitously – for their apocalyptic dragons.
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