Véra DOROFEEVA-LICHTMAN : « Concept politique derrière le jeu entre des “positions” »
Cet article vise à montrer que l’expression d’idées politiques par le biais de concepts spatiaux est un trait important et caractéristique de la pensée politique chinoise ancienne.
Après un bref aperçu des principes fondamentaux de la conception de l’espace terrestre en Chine ancienne, l’auteur examine deux représentations spatiales schématiques des sept puissances de la période des Royaumes Combattants (403-222 B.C.). Leur comparaison fournit une bonne illustration de la manière dont la représentation d’un ensemble de royaumes comme combinaison de “positions” ordonnées selon les directions cardinales a pu servir d’outil pour établir un système sophistiqué de relations entre ces royaumes. Un tel système et, partant, le concept politique exprimé, change du tout au tout avec l’altération des “positions”.
Michael LACKNER : « La position d’une expression dans un texte : explorations diagrammatiques de la signification »
Certains philosophes de la période Song-Yuan ont exploré le sens de passages du canon classique à l’aide de diagrammes. Nous pouvons ainsi saisir leur manière d’interpréter un texte donné, et montrer comme ils recoururent, pour ce faire, aux positions des mots, des expressions et des propositions. De plus, la comparaison entre deux diagrammes, en compétition pour l’interprétation d’un même paragraphe du Zhongyong, et incarnant tous deux des aspects du commentaire de Zhu Xi, nous permet d’analyser le rôle joué par le placement d’un élément dans un tel diagramme.
Marianne BASTID-BRUGUIÈRE : « La “position” dans le cérémonial d’État à la fin de l’Empire »
Marquée sur le sol ou consignée dans des descriptions illustrées, la position des participants et des objets rituels est restée jusqu’à nos jours un élément majeur du cérémonial d’État en Chine. La notion sert à définir, organiser et figurer l’espace cérémonial en fonction des catégories, non des individus, qui participent au rituel. La figure, donnant seulement l’ordonnance de la cérémonie à son moment initial, montre l’ordre global que le rite doit manifester plus qu’elle n’en prévoit l’exécution. Les positions ne sont pas des localisations définies par des mesures fixes, mais des repères en relation avec d’autres dans une configuration. Leur usage inscrit les réalités divines et humaines dans un espace orienté qui correspond au cosmos. La position de chaque élément traduit à la fois sa force intrinsèque et celles qui s’exercent sur lui dans un ordre hiérarchique que réfléchit la configuration spatiale.
Marc KALINOWSKI : « Astrologie calendaire et calcul de position dans la Chine ancienne »
La notion de position (wei) est abordée selon deux perspectives. La première cherche à la définir en rapport avec les trois composantes caractéristiques de l’astrologie calendaire chinoise : le cycle sexagésimal, une cosmographie schématique et la doctrine des cinq agents (wuxing) Dans ce cadre, le wei représente une conjonction d’espace et de temps, exprimée en termes d’indices sexagésimaux. Les positions forment des réseaux servant à la conversion des phénomènes astronomiques ou climatiques en données pour l’interprétation des événements. Les phénomènes, en se logeant sur ces dispositifs, s’investissent des propriétés liées à leur wei. Dans un second temps, l’article montre le rôle joué par les positions dans la formation des principaux systèmes de divination de la période classique.
Karine CHELMA : « Positions et changements en mathématiques à partir de textes chinois des dynasties Han à Song-Yuan.
Quelques remarques »
L’article vise à rendre compte de la récurrence de notations positionnelles dans les textes mathématiques chinois. À cette fin, il les inscrit dans un contexte plus large : l’usage que les mathématiciens chinois ont fait des positions au cours de leurs opérations sur une surface avec des baguettes à calculer. Une reconstruction de leur pratique montre que les positions sont des entités dynamiques et, de fait, les termes sur lesquels les calculs portent. En conséquence, il apparaît que les notations positionnelles impliquent un type spécifique de telles entités : celles dont le comportement présente une uniformité. Ce fait lie leur récurrence aux buts poursuivis dans la recherche algorithmique.
Chung-ying CHENG : « Le Zhouyi et la philosophie des Wei (Positions) »
L’article explicite la philosophie des positions (wei) dans le Zhouyi (Yijing) en termes de l’ontocosmologie sous-jacente à l’ouvrage. Il montre comment la notion de wei doit être comprise en relation avec le système global d’une réalité créatrice, d’une part, et en relation avec les vertus qu’une personne peut acquérir, d’autre part. Le rôle des positions dans le système des gua du Zhouyi est également mis en lumière, et la logique des lignes yao au sein du système des gua esquissée.
Geoffrey LLOYD : « Mettre les Grecs à leur place »
Après des considérations méthodologiques sur les études comparatives et une enquête terminologique sur les mots grecs permettant l’expression d’idées liées à la “position”, l’auteur discute deux points : 1) Le changement comme sujet de recherche, puisque les positions (wei) semblent avoir servi d’outils pour un tel travail en Chine. 2) L’association des places ou des positions avec le rang ou l’expression de hiérarchies. Dans cet ordre d’idées, quelques usages grecs de la polarité et les diverses connexions qu’ils présentent avec la vie publique sont discutés. Cela l’amène à considérer des positions singulières qui ont fait l’objet d’une attention particulière dans l’Antiquité classique : le milieu ou la “moyenne”.