Presses Universitaires de Vincennes

Université Paris 8 Vincennes-Saint-Denis

Partager

ajouter au panier

Revue Marges. revue d'art contemporain
Nombre de pages : 192
Langue : français
Paru le : 17/04/2024
EAN : 9782379243882
Première édition
CLIL : 3675 Revues sur l’art
Illustration(s) : Oui
Dimensions (Lxl) : 220×155 mm
Version papier
EAN : 9782379243882

Sociologie de l’art contemporain

N°38/2024

Les dernières années ont vu se multiplier les recherches sur l’art moderne et contemporain inspirées par les méthodes de la sociologie ou de l’histoire sociale de l’art. Mais cette orientation est encore loin d’être courante, dans une discipline, l’histoire de l’art, qui a une longue tradition de défiance vis à-vis des sciences sociales.

 

 

Éditorial – Jérôme Glicenstein


Dossier : Sociologie de l’art contemporain

Nicolas Heimendinger

« Introduction. Sociologie et histoire de l’art contemporain : apports mutuels et obstacles à l’interdisciplinarité »

Rafaëlle Hassine

« Produire pour un auteur. Ethnographie du studio d’un artiste contemporain »

Maud Barranger-Favreau

« Réhistoriciser la vocation artistique : des ambivalences d’un mythe aux limites d’un concept »

Brianne Dubois

« Cattelan est-il l’auteur des œuvres qu’il n’a pas fabriquées ? Ce que la sociologie du travail peut apporter à la compréhension d’un procès en art contemporain »

Anne Bessette

« Œuvres d’art ou vandalismes ? Légitimité et appropriations artistiques »

Inès Dahn

« Pour une sociologie des labels artistiques : “La Nueva Imagen” (1982) et la réception du néo-expressionisme en Argentine »

Elisa Ullauri Llore

« Être plusieurs publics à la fois, mais pas toujours ». Une sociologie territorialisée des publics, non-publics et micro-publics de l’art contemporain

Mathilde Provansal

« Usages et apports des méthodes mixtes dans une recherche sociologique sur les inégalités de genre dans l’art contemporain »

 

Entretien

Entretien de Nicolas Heimendinger avec Anne Lafont et Séverine Sofio

               

Portfolio

Carla Adra

 

Notes de lecture et comptes rendus d’expositions

Abstracts français et anglais

Réhistoriciser la vocation artistique : des ambivalences d’un mythe aux limites d’un concept

Maud Barranger-Favreau

Pour des raisons historiques et sociales, l’activité artistique est reconnue comme vocationnelle. Cet héritage moderne semble toutefois remis en question par le monde actuel de l’art, y compris dans une perspective critique. À l’aune de ces transformations, il s’agit d’interroger la pertinence du concept de vocation en tant que grille d’analyse et, partant, de proposer des pistes de réflexions dans le souci de mettre à jour les outils et les méthodes de la sociologie de l’art.

Mots clés : Vocation, critiques, historicisation

 

Œuvres d’art ou vandalismes ? Légitimité et appropriations artistiques

Anne Bessette

Cet article propose d’examiner les conditions qui ont participé à rendre envisageable, pour certains artistes, de concevoir des propositions créatrices sous forme de modification d’œuvres existantes. Il s’avère instructif d’examiner le traitement différencié des réutilisations d’œuvres dans une démarche créative, d’analyser les spécificités des modifications considérées comme « recevables » et des actes condamnés en tant que vandalisme. Cela invite à questionner les conditions auxquelles une action artistique est qualifiée de vandalisme.

Mots clés : vandalisme, appropriation, légitimation


Pour une sociologie des labels artistiques : « La Nueva Imagen » (1982) et la réception du néo-expressionisme en Argentine

Inès Dahn

L’article analyse le label de peinture neo-expressioniste argentin « La Nueva Imagen » (1982), et la figure de son passeur Jorge Glusberg, sous un angle sociologique, plus précisément celui de la théorie bourdieusienne des champs. Cette approche contribue à rendre visibles les luttes associées à la prescription des styles, notamment quand elles dépassent les cadres nationaux. Il analyse les conditions d’apparition, ses modes de circulation ainsi que les possibles contestations de ce label, dans le but de le situer dans l’espace social plus large dans lequel se joue son succès ou son échec.

Mots clés : Champ artistique argentin, critique d’art, sociologie de l’art

 

Cattelan est-il l’auteur des œuvres qu’il n’a pas fabriquées ? Ce que la sociologie peut apporter à la compréhension d’un procès en art contemporain

Brianne Dubois

Le 13 mai 2022, un procès a opposé le sculpteur Daniel Druet à l’artiste contemporain Maurizio Cattelan, à son galeriste Emmanuel Perrotin et à la Monnaie de Paris. Druet demande alors à être reconnu comme l’auteur d’une série d’œuvres qu’il a fabriquées pour Cattelan. En nous appuyant sur l’observation du procès, les conclusions écrites de chacune des parties et un entretien avec Druet, nous présentons comment s’est construite l’argumentation de Druet visant à contester l’organisation de la délégation du travail artistique et ce qu’elle dit du fonctionnement du monde de l’art.

Mots clés : art contemporain, division du travail, procès

 

Produire pour un auteur. Ethnographie du studio d’un artiste contemporain.

Rafaëlle Hassine

À partir d’une enquête ethnographique réalisée au sein du studio d’un plasticien reconnu à l’internationale à la tête d’une équipe d’assistants, cet article analyse la division et l’organisation du travail de conception et de production des œuvres d’art contemporain. Il interroge la façon dont artistes et autres travailleurs en studio parviennent aboutissent des créations uniques, partageant des qualités visuelles et matérielles associées à un même auteur.

Mots clefs : studios d’artistes, division du travail, production.  


Usages et apports des méthodes mixtes dans une recherche sociologique sur les inégalités de genre dans l’art contemporain

Mathilde Provansal

À partir d’une enquête sociologique sur les inégalités de genre dans l’art contemporain, cet article interroge les usages et les apports des méthodes mixtes dans le processus de production de connaissance sociologique. Après avoir présenté la problématique et l’objet de cette recherche pour appréhender la pertinence du pluralisme méthodologique, l’article souligne comment la combinaison des approches qualitatives et quantitatives permet de développer des résultats de recherche originaux.

Mots clés : Méthodes mixtes, genre, artiste

 

« Être plusieurs publics à la fois, mais pas toujours » Une sociologie territorialisée des publics, non-publics et micro-publics de l’art contemporain

Elisa Ullauri Lloré

Cet article explore les limites entre les catégories de publics et de non-publics de l’art contemporain en prenant en considération la diversité des pratiques culturelles, de loisir et d’utilisation de l’espace, observée dans le contexte local du FRAC Sud, implanté dans un quartier en rénovation à Marseille. Nous analysons comment les enjeux matériels et symboliques, liés à une intégration parfois problématique, contribuent à remodeler des relations souples entre des micro-publics et l’art contemporain.

Mots clés : Publics, Territoire, pratiques culturelles et socio spatiales

 

Rehistoricizing Artistic Vocation: From the ambivalences of a myth to the limits of a concept

Maud Barranger-Favreau

For historical and social reasons, artistic activity is acknowledged as vocational. However, this modern legacy appears to be questioned by the contemporary art world, including from a critical standpoint. In the light of these transformations, the aim is to examine the relevance of the concept of vocation as an analytical grid and, thus, to propose lines of thought with the intention of updating the tools and methods of art sociology.

Keywords: Vocation, critics, historicization


Artworks or Vandalism? Artistic Appropriations and Legitimacy

Anne Bessette

This article examines the conditions that have made it possible for certain artists to develop artistic proposals in the form of modifications to existing works. It is instructive to examine the different ways in which the re-use of works is treated as part of a creative process, and to analyse the specific features of modifications that are considered ‘acceptable’ and acts that are condemned as vandalism. This invites us to question the conditions under which an artistic action is qualified as vandalism.

Keywords: vandalism, appropriation, legitimation

 

Towards a sociology of artistic labels: “La Nueva Imagen” (1982) and the reception of neo-expressionism in Argentina

Inès Dahn

This article analyzes the Argentinian neo-expressionist label “La Nueva Imagen” (1982), and the figure of its promoter Jorge Glusberg, from a sociological point of view, more specifically Bourdieusian field theory. This approach contributes to make visible the struggles associated with the prescription of styles, particularly when they transcend national limits. It analyzes the conditions of appearance, modes of circulation and possible contestations of this label, with the aim of situating it in the wider social space in which its success or failure is played out.

Keywords: Argentinean art field, art criticism, sociology of art

 

Is Cattelan the Author of Works He Did Not Fabricate? What Sociology Can Contribute to the Understanding of a Trial in Contemporary Art

Brianne Dubois

On May 13, 2022, a trial brought sculptor Daniel Druet against contemporary artist Maurizio Cattelan, his gallery Emmanuel Perrotin and the Monnaie de Paris. Druet asked to be recognized as the author of a series of works he had crafted for Cattelan. Based on observation of the trial, the legal submissions of each of the parties and an interview with Druet, we present the construction of Druet’s argument challenging the organization of the delegation of artistic work and what it says about the art world.

Keywords: contemporary art, division of labor, lawsuit

 

Producing for an Author: Ethnography of a Contemporary Artist’s Studio.

Rafaëlle Hassine

This article is based on an ethnographic research conducted in the studio of an internationally recognized visual artist who heads a team of assistants. It analyzes the division and organization of work in the design and production of contemporary artworks. It examines how artists and other studio workers manage to produce unique creations, all sharing visual and material qualities associated with the expression of a single author.

Keywords: artists’ studios, division of labor, production.

 

Uses and contributions of mixed methods in a sociological research on gender inequality in contemporary art

Mathilde Provansal

Based on a sociological study of gender inequality in contemporary art, this article examines the uses and contributions of mixed methods in the process of producing sociological knowledge. The article first presents the research question and the object of this research to understand the relevance of methodological pluralism. Then it highlights how the combination of qualitative and quantitative approaches makes it possible to develop original research results.

Keywords: Mixed methods, gender, artist

 

« “Multiple Audiences at Once, but Not Always”: A Territorialized Sociology of Audiences, Non-Audiences, and Micro-Audiences in Contemporary Art. »

Elisa Ullauri Lloré

This article explores the boundaries between the categories of audiences and non-audiences of contemporary art, considering the diversity of cultural practices, entertainment, and space utilization observed in the local context of FRAC Sud, located in a renovated neighborhood in Marseille. We analyze how material and symbolic challenges, linked to sometimes problematic integration, contribute to reshaping flexible relationships between micro-audiences and contemporary art.

Keywords: Audiences, Territory, Cultural and Socio-spatial Practices

Éditorial

L’art contemporain semble appeler l’analyse sociologique. D’abord, parce que les artistes eux-mêmes ont fait des conditions sociales de production et de réception de l’art un matériau de leurs œuvres, depuis les multiples réinterprétations du ready-made jusqu’aux diverses ramifications de la critique institutionnelle. Ensuite, parce que le champ de l’art contemporain se caractérise par la complexification et la multiplication des organisations qui le composent : un marché mondialisé des œuvres et des réseaux d’institutions aux statuts très variés. Enfin, plus que d’autres disciplines artistiques, l’art contemporain apparaît comme une pratique culturelle socialement sélective, en butte à d’importants rejets de la part du grand public et de divers acteurs sociaux. Pour ces différentes raisons, il semble bien que le fait de s’en tenir aux œuvres et à leurs auteurs, à l’instar d’une pratique très ancrée chez les praticiens de l’histoire de l’art, manquerait certains traits fondamentaux de la situation actuelle des arts plastiques.

Ceci explique peut-être que les dernières années aient vu se multiplier les recherches sur l’art moderne et contemporain inspirées par les méthodes de la sociologie ou de l’histoire sociale de l’art. Mais cette orientation est encore loin d’être courante pour une discipline, l’histoire de l’art, qui a une longue tradition de défiance vis-à-vis des sciences sociales.

Réciproquement, les sociologues sont relativement peu nombreux à s’aventurer sur le terrain de l’art contemporain, peut-être parce que ce champ de production culturelle dresse un certain nombre de barrières pour qui veut l’appréhender d’un regard extérieur. Les ouvrages classiques de la sociologie de l’art – ceux de Raymonde Moulin, Pierre Bourdieu, Howard Becker ou Harrison et Cynthia White – sont déjà anciens. La période qui a suivi n’a pas vu émerger autant de grands modèles théoriques, même si une autrice telle que Nathalie Heinich, a en partie tenté de le faire. En revanche, des études plus empiriques et spécialisées sont régulièrement publiées : sur le marché de l’art (Alain Quemin), les curateurs d’art contemporain (Laurent Jeanpierre), les artistes femmes (Séverine Sofio), les collectifs d’artistes (Séverine Marguin), le vandalisme dans les musées (Anne Bessette), la sociologie des artistes (Guy Bellavance), etc. Enfin, d’importants auteurs étrangers restent peu traduits et/ou peu discutés en France, comme Diana Crane, Paul DiMaggio ou Vera Zolberg pour les États-Unis, Arnold Gehlen, Niklas Luhmann ou Alphons Silbermann pour l’Allemagne, etc.

Quoi qu’il en soit, l’idée sous-jacente à ce numéro est non seulement que la sociologie peut enrichir l’étude de l’art contemporain au moment où, réciproquement, l’art contemporain constitue un objet d’étude fructueux pour la sociologie de l’art et de la culture, voire pour la sociologie en général. Les cas de Becker et Bourdieu, qui ont tous deux construit des théories sociales d’ensemble à partir notamment d’enquêtes sur l’activité artistique, en sont un signe probant. Le numéro débute par une introduction de Nicolas Heimendinger qui permet justement de revenir sur ces questions, mêlant une réflexion sur la question des apports mutuels entre sociologie et art contemporain et sur la question plus générale de l’apport heuristique de l’interdisciplinarité.

La première partie du numéro peut être vue comme une suite d’études à propos des conditions de la création en ce début de 21e siècle. Rafaëlle Hassine s’intéresse au fonctionnement de l’atelier d’un artiste berlinois et elle remarque combien la division du travail et les relations entre les employés participe de la création d’une identité à la fois collective et singulière, cette identité se substituant à ce qui faisait l’image de l’artiste à l’âge moderne. Maud Barranger-Favreau prolonge la même question en s’interrogeant sur le devenir de la vocation artistique à notre époque, analysant les conséquences de l’évolution du statut des artistes à notre époque, ainsi que les frictions que cette évolution occasionne, ce qui donne notamment lieu au mouvement des « travailleur∙euses » de l’art. Enfin, Brianne Dubois analyse le procès intenté par Daniel Druet à Maurizio Cattelan. Là encore, ce procès témoigne d’un changement d’époque : Druet a été formé selon une conception classique de la figure de l’artiste – auteur matériel de ses œuvres – avec un respect pour le « métier », qui fonde la pratique concrète de son art. À l’inverse, non seulement Cattelan ne partage pas cette conception, mais il s’efforce de l’ignorer complètement, ce dont le procès rend compte, synthétisant assez bien le différend qui existe en la matière.

La deuxième partie propose des études plus ciblées. Anne Bessette s’intéresse à différents cas de « vandalismes artistiques », c’est-à-dire à des destructions d’œuvres qui se font avec l’intention de produire une nouvelle œuvre. Là aussi, ce genre d’attitude aurait pu paraître inconcevable avant l’émergence de l’art contemporain. Et si ce genre de posture peut être recevable artistiquement, elle pose toujours des questions d’ordre légal ou social. Dans un registre différent, Inès Dahn s’interroge sur l’attribution (et la construction) de labels artistiques, en prenant l’exemple d’une mouvance artistique argentine des années 1980, « La Nueva Imagen » et de son passeur Jorge Glusberg. Les processus en jeu ne sont pas sans évoquer ce qui a pu se faire à la même époque en Europe et en Amérique du Nord. Elisa Ullauri Llore s’interroge, quant à elle, sur l’implantation ambivalente du FRAC Sud à Marseille dans le quartier de la Joliette. D’un côté, le FRAC participe de la rénovation urbaine de Marseille, mais de l’autre, il se fond tellement bien dans le paysage qu’il n’est identifié par les habitants du quartier. Enfin, le dernier article du dossier, dû à Mathilde Provensal rend compte d’une enquête menée sur les inégalités de genre dans le champ de l’art contemporain, un domaine où elles sont visiblement encore très prégnantes.

Le dossier est complété par un entretien entre Nicolas Heimendinger, Anne Lafont et Séverine Sofio au sujet de la place de l’analyse sociologique pour aborder l’art de notre époque. Enfin, Marges accueille un portfolio de Carla Adra et quelques comptes rendus.


Jérôme Glicenstein

Avril 2024

ajouter au panier

Revue Marges. revue d'art contemporain
Nombre de pages : 192
Langue : français
Paru le : 17/04/2024
EAN : 9782379243882
Première édition
CLIL : 3675 Revues sur l’art
Illustration(s) : Oui
Dimensions (Lxl) : 220×155 mm
Version papier
EAN : 9782379243882

Sur le même thème